Dans chaque commune, il existe une liste électorale et, le
cas échéant, deux listes complémentaires. Qui contrôle ces listes ? En bon
démocrate, vous allez répondre : le maire ou la population locale, sous une forme
ou une autre !
Erreur.
La commission chargée de
la revision des listes se compose du maire ou
de son représentant, d’un délégué de
l’administration désigné par le préfet ou
le sous-préfet, et d’un délégué
choisi par le président du tribunal de grande
instance. Les décisions de radiation ou d’inscription se
prenant à la majorité,
le maire est minoritaire dans sa commune.
D'ailleurs, ce n'est pas lui qui préside la commission. La présence de l’administration dans une telle commission
est utile. Elle dispose de fichiers administratifs qui permettent de détecter les citoyens qui seraient inscrits dans
plusieurs communes. Celle du représentant de l’institution judiciaire est, elle
aussi, utile. Les fichiers judiciaires permettent d’identifier les citoyens déchus de leur droit
de vote à cause d’une condamnation pénale. Toutefois, ces deux personnes ne sont pas là à titre
consultatif. Ensemble, ils ont précédence sur le maire. La commission permet de
confronter un certain nombre de
données confidentielles que le naïf citoyen imagine
protégées, d'une façon ou d'une autre :
vérification de
nationalité, de domicile, ainsi que des décisions de
justice entraînant une
perte des droits civiques.
Qui est donc ce personnage
discret qui représente le préfet,
c’est-à-dire l’ordre établi ? Est-ce un
fonctionnaire contraint au devoir
de réserve ? Est-il astreint à une obligation morale,
comme le prêtre qui ne peut dévoiler les secrets de
la confession ?
Ou, à l'inverse, serait-il l'émanation d'une organisation para-civile,
comme on parle, dans les dictatures, d'organisations para-militaires ?
L'organisation
de la république procède, en France, d'une tradition
particulière. D'un côté le peuple et ses
élus, qui s'échauffent pour les grands principes ou les
belles idées. De l'autre les réseaux de responsables
administratifs, fonctionnaires plus ou moins hauts, citoyens
"sûrs", qui accèdent aux données et manipulent les
rouages du pouvoir. Il y a un siècle, le fichage des
militaires avait été confié au Grand Orient de France (Voir Combes et Franc-maçonnerie) Aujourd'hui, la vérification
que les écoles sont bien dans la norme est confiée aux
délégués départementaux de l'Education
nationale (DDEN). Ce sont d'anciens fonctionnaires de
l’Education
Nationale ayant donné la preuve de leur adhésion à
l’ordre établi (Voir DDEN).
Le fichage des électeurs
est confié, de façon opaque, à un
équivalent des DDEN, via l’Education nationale. Si vous
n’êtes pas un ancien
fonctionnaire, vous n’avez aucune chance d’accéder
aux données confidentielles
de vos concitoyens.
Quel lien, direz-vous, entre
l'inspection académique et la préfecture ? Les profs
constituent un milieu si contestataire, si différent des
préfectures !
Eh bien, il faut croire que, dans
ce vivier, frétillent d'excellents poissons. Le pouvoir
centralisé y pêche, avec l'aide de conseillers
adéquats, des individus formatés intellectuellement pour le
contrôle de la démocratie à la française.
Et puis, avouez-le... Le privilège
d'avoir accès aux données confidentielles de vos concitoyens, vous ne
sauriez qu'en faire. Sauf seulement pour aider votre commune à établir des listes électorales.