Mercuriale de mars 2007


Cela allait sans dire, mais c’est beaucoup mieux quand les choses sont clairement exprimées. Le vrai porte-drapeau de l’anti-communautarisme est Marine Le Pen.
Au cours de l'émission télévisée Ripostes, le 21 janvier 2007, elle tricote le programme de l’alignement citoyen. Premier point, établir le monolinguisme. « La langue qui est un élément fondamental de lien du peuple français, est en train de disparaître. Sous le règne de M. Sarkozy est apparu, en Bretagne par exemple, le bilinguisme. C'est-à-dire que vous avez, non plus ce qui pouvait être compréhensible, le nom de la ville en breton. Mais maintenant vous avez par exemple « Toutes directions » ou « Zone commerciale » ; c'est-à-dire que l'on revient au bilinguisme et ça c'est extrêmement grave. ».
Le monolinguisme est un idéal républicain, proclamé dès 1794 par Barère et l’abbé Grégoire. Voir cet idéal échouer si près du but sur pression des ploucs européens, à qui la France impose par ailleurs le respect de leurs propres minorités, ce serait vraiment la guigne.
Le programme présidentiel du papa, lui, fait dans l’anti-communautarisme soft et cultive l’esprit de Valmy. La jeunesse est plus franche et plus idéaliste.

Pourquoi Marine Le Pen est-elle le véritable porte-drapeau de l’anti-communautarisme, et non Jean-Pierre Chevènement, ou même la Libre-Pensée qui pourtant s'y dépense sans compter ?
Tout simplement parce que ces derniers ne représentent pas grand chose dans l’opinion, et surtout parce qu’ils sont incohérents. Figurez-vous qu’il leur arrive de voir avec sympathie la survie des peuples tchétchène, kosovar ou kurde. Ces combats pourtant ne sont pas les leurs. Prenons le cas tchétchène. Ce pays se veut musulman alors que la Russie est laïque. Les Tchétchènes s’accrochent à leur passé de souffrance, alors que la Russie a pardonné le mal qu’elle leur avait fait. Ils s’obstinent à parler une langue sans avenir face au russe. Pendant la guerre 39-45, les Tchétchènes ont provoqué une insurrection et appelé à eux les armées allemandes (voir Tchétchénie). De vrais Breiz Atao !
Combat juste au-delà des Pyrénées, communautariste en deçà ? Cela ne tient pas debout. On se moque avec raison de l’histoire du nuage radio-actif de Tchernobyl qui s’est arrêté aux frontières françaises. Devrait-on feindre de croire que les minorités nationales n'existent qu'au-delà des mêmes  frontières ?
Ceux qui rêvent chez nous d'une république une et indivisible partagent le même idéal que les armées de Serbie, de Russie ou de Turquie. Qu'ils assument l'image que renvoie le miroir mondial !
Dans les divers comités de soutien aux peuples en lutte, un anti-communautariste doit être considéré comme un maillon faible, un flic ou un provocateur. N'hésitez pas à le renvoyer chez lui.

L’anti-communautarisme français est mouvant et hétéroclite. Les robes de gauche et les pantalons de droite tombent lorsque s’ébroue la carmagnole jacobine. Y dansent et y pensent en rond les nostalgiques de la bourgeoisie sanguinaire de 1789, les ravis de la laïcité à rouflaquettes, les bénéficiaires ombrageux de régimes spéciaux, les têtes rasées du racisme et de la xénophobie. Entre eux, les jubjotantes de la gesta Dei per Francos et les apeurées centripètes y tortillent des fesses.
Derrière la sarabande, quel Meetic© du fantasme citoyen pourrait donc s’établir pour prélever les abonnements ? Le Front National est à l'avant-garde du repli tricolore et de l'exception française. L’adhésion de l’intellectuel communiste, républicain  et anti-communautariste Alain Soral est un petit pas pour l’homme, un grand pas pour la francitude.
Les anti-communautaristes de gauche font aujourd’hui la fine bouche devant cette perspective. Ils ressemblent bougrement aux néo-socialistes des années trente qui se piquaient de différences avec le national-socialisme. Ils allaient bientôt le rejoindre.

Personne aujourd’hui ne se dit communautariste. L’identité n’a que faire d’idéologie. Toutefois, en observant vers où dérive l’anti-communautarisme, comme autrefois l’anti-communisme, on ressent une nécessité de faire entrer le multilinguisme et la diversité jubilatoire dans la sphère publique.
JPLM


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ContreCulture Mercuriale 2007/03