Gaulois et milicien
Mythe du bon Gaulois et
mythe du bon Français (années 40)

Gaulois (nos ancêtres les)





Mythologie des origines


         " La Gaule, dans son ensemble, est divisée en trois parties, dont l'une est habitée par les Belges, l'autre par les Aquitains, la troisième par ceux qui dans leur propre langue se nomment Celtes, et, dans la nôtre, Gaulois. Tous ces peuples diffèrent entre eux par la langue, les coutumes, les lois. Les Gaulois sont séparés des Aquitains par le cours de la Garonne, des Belges par la Marne et la Seine.
          Les plus braves de tous ces peuples sont les Belges, parce qu'ils sont les plus éloignés de la civilisation et des mœurs raffinées de la Province, parce que les marchands vont très rarement chez eux et n'y importent pas ce qui est propre à amollir les cœurs, parce qu'ils sont les plus voisins des Germains qui habitent au-delà du Rhin et avec qui ils sont continuellement en guerre. Il en est de même des Helvètes, qui surpassent aussi en valeur le reste des Gaulois, parce qu'ils sont presque chaque jour aux prises avec les Germains, soit pour les empêcher de pénétrer sur leurs territoires, soit pour porter eux-mêmes la guerre dans leur pays.
          La partie de la Gaule qu'occupent, comme nous l'avons dit, les Gaulois, commence au fleuve Rhône et a pour limite le fleuve Garonne, l'Océan et la frontière des Belges ; elle touche aussi au fleuve Rhin du côté des Séquanais et des Helvètes. Le pays des Belges commence aux confins extrêmes de la Gaule ; il s'étend jusqu'à la partie inférieure du cours du Rhin ; il regarde vers le septentrion et l'orient. L'Aquitaine s'étend du fleuve Garonne aux monts Pyrénées et à la partie de l'océan qui baigne l'Espagne ; elle regarde entre l'occident et le septentrion. ".
                             ( J. César. La guerre des Gaules. Traduction Maurice Rat. Ed Garnier-Flammarion 1964.)

          Le texte ci-dessus est révélateur de ce qu'est la Gaule : non pas une nation, mais une zone géographique assez mal déterminée. Ce n'est sûrement pas une nation, et César est parfaitement explicite là-dessus :

" Tous ces peuples diffèrent entre eux par la langue, les coutumes, les lois ".

             Avant César, les Latins différenciaient la Gallia cisalpina ou citerior, et la Gallia transalpina ou ulterior. La Gaule Cisalpine correspond grosso-modo à l'Italie du Nord (La Padanie, ou région du Pô). La Gaule transalpine comprenait la Gallia provincia, l'actuelle Provence, qui était soumise à Rome, et la Gaule indépendante.
            Pour les Romains, est gaulois tout ce qui, en Europe occidentale au nord des Pyrénées, n'est ni latin ni germain. C'est l'étranger proche, sans plus. Remarquons que le mot " gall " possède, en breton et en irlandais moderne, cette signification d'étranger proche.


               Parfois César parle des Gaulois comme des habitants de l'ensemble de la Gaule indépendante, excluant la Province. Parfois, il en parle comme des seuls habitants de la Gaule celtique. Hirtius, dans la suite qu'il donne aux Commentaires de César, rassemble les habitants de la Gaule belgique et de la Gaule celtique, mais exclut les Aquitains (1) .

          Quand on veut parler de la Gaule dans son ensemble, trois possibilités existent.

1 - Soit on considère que la Gaule est le territoire de ceux qui se considèrent eux-mêmes comme Gaulois ; c'est le territoire de la Gaule celtique.

2 - Soit on adopte la définition de César de la "Gaule dans son ensemble", qui concerne les trois parties de la Gaule indépendante, c'est-à-dire l'étranger proche mais non germain. On exclut alors la Narbonnaise, c'est-à-dire le sud-est de l'actuelle France. On inclut ou on exclut le territoire des Helvètes, dans la mesure où César n'est pas clair à ce sujet ;  mais soit on l'inclut totalement, soit on l'exclut totalement.


2 - La troisième possibilité est d'inclure les territoires gaulois déjà soumis à l'autorité romaine. On rajoute dans ce cas la Narbonnaise, mais aussi toutes les zones soumises avant César et clairement qualifiées par les Romains de " gauloises ". Il faut donc logiquement inclure la Gaule  cisalpine, qui recouvre toute l'Italie du Nord.
  Quelles que soient les logiques choisies, nous sommes loin de l'Hexagone français.
La gaule gauloise
La Gaule "habitée par les Gaulois" selon César
La Gaule dans son ensemble
La Gaule "dans son ensemble" selon César
gaule cisalpine et transalpine
La Gaule intégrale, cisalpine et transalpine,
au temps de César.
La gaule française
La Gaule "française", celle que l'on apprend dans les écoles,  inscrite d'autorité dans les limites actuelle de la France. Un anachronisme et une arnaque identitaire.


           C'est  Richelieu qui fit de la filiation géographique entre la Gaule et la France un mythe national. Au cours des guerres franco-espagnoles pour la succession au trône d'Espagne et la conquête des Pays-Bas, l'occupation française ravage la Lorraine, déjà meurtrie par la Guerre de Trente Ans. La Lorraine indépendante n'y survivra pas.

           Richelieu, puis Mazarin, enhardi par les conquêtes, élaborent le projet de donner à la France des frontières naturelles (Pyrénées et Rhin). Ils justifient cette prétention par un argument historique ou plutôt mythologique. Il faut " remettre la France partout où était la Gaule ".

           Le mythe de la filiation gauloise et des frontières naturelles sera repris par la monarchie, puis par la république française (Voir "guerre préventive").

(1) " A cette nouvelle, César, voyant que tout avait bien marché sur tous les points de la Gaule, et jugeant que ses campagnes précédentes avaient vaincu et soumis la Gaule, partit pour l'Aquitaine, où il n'était jamais allé lui-même, mais où il avait vaincu partiellement grâce à Publius Crassus "  (Guerre de Gaules VIII/XLVI)     (retour au texte)


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ContreCulture / Gaulois version 1.2