Duras

Marguerite Duras (1914-1996)



Icône de François Mitterrand
et du PS (Propaganda Staffel)

Ah, Marguerite Duras !
Ca, c'est la France ! Provocatrice, juste assez compliquée pour être intello, mais pas trop. La laideur de Sartre version féminine, c'est-à-dire moins oppressante. Un alcoolisme populaire au milieu des alcoolismes mondains. Le chic parisien, sans l'angoisse du chic et avec les certitudes du Parisien.

Bon. Passons maintenant de l'autre côté du miroir...

Un livre de Jacques Henric, Politique (Ed Seuil, 2007), nous en apprend un peu plus sur la biographie de la dame. Plus exactement, il fait la synthèse de témoignages jusque-là dispersés.

En voici quelques extraits :

J'ai le souvenir, pour ma part, d'avoir eu connaissance du passé collaborationniste de Duras par une note en bas de page figurant dans la biographie de Gaston Gallimard, due à Pierre Assouline. C'était en 1984. Il y était fait allusion à l'existence de cette commission de la Propaganda Staffel où avait officié la jeune Marguerite Donnadieu, épouse Antelme, commission mise en place par un décret du maréchal, après la préalable aryanisation des maisons d'édition juives (Nathan, Calmann-Levy), puis prise en mains par les nazis. Son attribution : le contrôle du papier d'édition. Elle constituait ainsi un véritable organisme de censure qui épluchait les manuscrits reçus et avait la charge de distribuer le papier aux seuls "bons" éditeurs (entendons ceux qui avaient accepté, de leur plein gré, de retirer de la vente et ne plus publier les auteurs inscrits sur les listes dites "Otto" et "Bernhard", à savoir les auteurs juifs, communistes, ou ceux ayant eu par le passé une attitude critique à l'égard de l'Allemagne et de sa culture). " Marguerite, écrit Laure Adler dans la biographie qu'elle lui a consacrée, ne pouvait ignorer le degré de collaboration de cet organisme constamment surveillé par la Propaganda ". Paul Morand eut des responsabilités dans cette commission dirigée par un collaborateur notoire. Les noms de Ramon Fernandez, Brice Parain, Dionys Mascolo figurent dans la liste de la quarantaine de lecteurs accrédités par ladite commission. Quand à la secrétaire de celle-ci, c'était notre Marguerite Donnadieu-Antelme, qui deviendra plus tard l'intraitable résistante Marguerite Duras, l'impitoyable tortionnaire de collabos, puis la militante communiste (stalinienne, forcément stalinienne ?) pure et dure. Ne manquant pas d'aplomb, à la Libération, l'incorruptible communiste s'en prendra avec une farouche énergie à tous ces veaux de Français qui n'avaient pas ouvertement pris parti contre Pétain (...).

Le jeunot que j'étais ne pouvait imaginer que cette forte figure de femme, (...) avait fréquenté l'ambassadeur du Troisième Reich à Paris, Otto Abetz et le Sonderführer Gerhard Heller, avait été la maîtresse (pour la "bonne cause" s'entend) du gestapiste qui avait fait arrêter et déporter son mari, Robert Antelme, pour  ensuite non pas s'engager vraiment dans la lutte armée contre l'occupant nazi (...) mais, tâche moins périlleuse, participer à des séances de torture d'un détenu soupçonné de collaboration. Il faut relire l'époustouflant récit de l'interrogatoire "musclé" que la frêle petite bonne femme a mené avec un sacré coeur à l'ouvrage dans un local de la rue de Richelieu. Et sans doute serais-je tombé d'encore un peu plus haut si j'avais vu en cette farouche militante de la lutte anti-impérialiste (...) le co-auteur d'un livre raciste, L'Empire français, monument apologétique dressé à la gloire du colonialisme français rédigé avant la guerre et publié après la défaite. Ce n'était tout de même plus une gamine immature et irresponsable qui écrivait à l'époque : "On ne peut pas mêler cette race jaune à notre race blanche" ou qui affirmait qu'il était du devoir "des races supérieures de civiliser les races inférieures".
(pages 170-172)

Robert Antelme épouse Marguerite Duras en septembre 1939. Après la défaite, pendant qu'elle se livre à la basse besogne qui consiste à surveiller, sous le regard attentif des Allemands, les maisons d'édition françaises, qu'elle reçoit dans son bureau les auteurs (ni juifs ni communistes, bien sûr, lesquels sont dès les débuts de l'Occupation interdits de publication), qu'elle lit leurs manuscrits, qu'elle juge quels écrits méritent ou non d'être publiés, Robert Antelme de son côté, occupe jusqu'en mai 1941 un poste de rédacteur auxiliaire à la préfecture de police, avant d'être engagé au cabinet du ministre de la Production industrielle, Pierre Pucheu, ancien militant auprès de Jacques Doriot et du colonel de La Rocque, chef des Croix-de-Feu. Quand Pucheu est affecté au ministère de l'Intérieur, Robert Antelme le suit et restera à ses côtés jusqu'à la fin de 1943. " Fonctions ambiguës ", dans les deux cas, commente une des biographes de Marguerite Duras, Frédérique Lebelley.
(Page 173)


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Contreculture / Duras version 1.0