Mercuriale de septembre 2013
L'écotaxe en 12 points
Voici, en 12 points, les éléments nécessaires pour comprendre l'écotaxe et ses conséquences.
1 - L'écotaxe est annoncée pour
favoriser le ferroutage et le transport fluvial (mais pas le transport
maritime). Aucune infrastructure rail-route n'a été mise en place par
les services publics en Bretagne. La seule compagnie ferroviaire à
avoir mis en place le ferroutage en Bretagne est Combiwest, par sa
plateforme de Morlaix. L'installation de Combiwest a été combattue par
la SNCF, afin de conserver son monopole et non pas d'apporter un
meilleur service au public. Les procédés employés par la SNCF n'ont
guère été loyaux : décrochage de wagons en gare de Rennes ; achat de sillons de blocage, procès à RFF.
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- La gestion du télépéage a été
confiée à Ecomouv, une entreprise détenue à
70% par une entreprise italienne, Autostrade per l'italia.
Sur 1,2 milliards d'euros qui devraient être
prélevés, 780 millions (65%) reviendra à l'Etat.
Ecomouv conservera 230 millions (hors TVA) pour la maintenance de ses
infrastructures. La part de l'Etat sera affectée à un
établissement public, l'Agence de Financement des
Infrastructures de Transport de France. L'agence est
présidée par Philippe Duron, député-maire
de Caen, qui vient de proposer par ailleurs au gouvernement (rapport
Duron) le report entre 2030 et 2050 de la prolongation de la ligne
à grande vitesse vers Brest et Quimper. Contrairement au Grand Paris, l'infrastructure des voies de communication en Bretagne ne fait pas partie des priorités françaises.
3 - L'écotaxe
prélevée sur les voies secondaires (160 millions d'euros
prévus par an) devrait revenir aux collectivités
chargées de les entretenir. Dans ce cas-là, la
finalité affichée par l'écotaxe n'a rien
d'écologique : c'est un télépéage pur et
simple. En leur donnant de l'argent prélevé sur leurs
propres concitoyens, ce qui ne lui coûte pas cher, l'Etat
achète la complicité des collectivités
territoriales au détriment de leurs administrés.
4 - Les
collectivités territoriales n'ont aucun moyen de mettre en
place, sur le territoire où l'écotaxe est
prélevée, une alternative au transport routier. Tout se
décide au niveau central. Contrairement au transport fluvial,
qui concerne le Grand Paris, le transport maritime, qui concerne la Bretagne, n'est pas considéré comme une alternative.
5 - En plus du péage,
les coûts supplémentaires liés à
l'écotaxe se cumulent : Paiement d'une caution pour le
prêt d'un boitier, installation de boitiers dans tous les
véhicules, immobilisation du camion si le boitier ne fonctionne
pas, coût kilométrique, amendes, sanctions pénales
ou administratives. Le coût cumulé des nouveaux
péages avoisine, dans certains cas, la marge de l'entreprise.
L'écotaxe produira du chômage.
6 - En cas de panne, perte ou
vol d'un équipement embarqué, la procédure est
tellement onéreuse, longue et compliquée que le moindre
incident sera catastrophique pour les transports d'animaux vivants et
de produits frais, vitaux pour la Bretagne. L'écotaxe produira
du gaspillage.
7 - Tous les transporteurs
revoient actuellement leurs tournées en utilisant des logiciels
d'optimisation. Jusqu'à présent, c'était la
distance qu'ils cherchaient à réduire. Désormais,
ce n'est plus la distance mais le coût. La conséquence
sera une augmentation des distances pour éviter les portiques.
L'écotaxe aboutira ainsi à augmenter l'émission de
polluants, ce qui est le contraire du but affiché.
L'écotaxe produira de la pollution.
8 - L'équilibre des
territoires est rompu dès qu'il y a des inégalités
d'accès. C'est la raison pour laquelle l'octroi, qui est une
taxe d'ancien régime, a été supprimé par la
Révolution française. C'est aussi la raison pour laquelle
les négociateurs du CELIB, dans les années 60 et 70,
voulaient pour la Bretagne des quatre-voies gratuites. Avec le
système écotaxe, les villages qui auront le malheur de
forcer un camion en fin de tournée à passer sous un
portique risquent de ne plus être approvisionnés. Les
zones rurales seront pénalisées, à la fois pour la
production (les entreprises y seront moins concurrentielles) et pour la
consommation (les coûts d'approvisionnement des ménages y
seront plus élevés). L'écotaxe produira de
l'inégalité.
9 - L'écotaxe est
liée à la création d'un fichier "Big Brother" de
mise sous tutelle et de surveillance, avec des données à
caractères personnels. Seront inscrits dans le fichier : nom et
adresse du redevable, adresse électronique, numéro de
téléphone, coordonnées bancaires, adresse d'envoi
des factures, nom des personnes pouvant disposer du véhicule,
Les portiques écotaxe enregistreront les dates et heures de
passage, ainsi que des images faisant apparaître la
totalité de la cabine du véhicule, les points de
géolocalisation associés, la destination. Le fichier
pourra être consulté par d'autres administrations que les
Douanes.
10 - Il est prévu de
soumettre à l'écotaxe tous les camions de plus de 3,5
tonnes, qu'ils soient pleins ou vides. La logique "pollueur-payeur"
rend cette barrière de 3,5 tonnes dérisoire. Tous les
véhicules à moteur polluent. La
généralisation de l'écotaxe à tous les
véhicules -et le flicage à toute la population- serait la
conséquence inévitable de son acceptation aujourd'hui sur
les camions.
11 - L'écotaxe devrait
aussi être payée par les camions des pays voisins.
Toutefois, tous les pays du monde n'ont pas de convention de
réciprocité ou de compatibilité dans
l'équipement des camions. Les pavillons de complaisance, comme
dans la marine marchande, sont inévitables.
12 - Pour la Bretagne, la
mise en place de l'écotaxe aura un sens symbolique très
fort : celui de la soumission des Bretons. L'absence d'octroi puis de
péage sur les routes bretonnes a toujours été
revendiqué comme le signe d'une spécificité
bretonne, que certains font remonter à Anne de Bretagne.
Admettre l'écotaxe, c'est admettre que les Bretons n'ont pas
leur mot à dire dans l'administration de leur propre territoire.
JPLM

Mercuriale septembre 2013