Mercuriale d’avril 2007
Qu'est-ce que l'identité nationale française ?
Il faut bien un ministère pour
imposer une réponse officielle et indiscutable à cette question. Une réponse qui fasse autorité
dans la sphère publique.
Il existe dans le monde des identités ouvertes et des
identités fermées, des identités composées et des identités monochromes. On ne
peut pas comparer l’identité bretonne, insuffisante donc ouverte, et l’identité
française qui se veut une totalité, un objectif final. L'identité bretonne est un point de départ.
Cette différence dans la conception de soi et du monde
perdure depuis des siècles, et c’est une des raisons pour
lesquelles nous
autres Bretons sommes volontiers indépendantistes. La France ne
veut pas être
une pièce de notre puzzle identitaire ; elle veut remplacer
le jeu tout
entier. C’est une prétention que nous avons du mal
à comprendre ; et plus la France décline, plus nous avons
du mal à nous y soumettre.
La France, objet fini, massif et monochrome, ne nous
convient pas. Le monolinguisme procède de l'arrogance.
Sans doute serions-nous plus à l’aise en étant
citoyens
britanniques, eux qui peuvent assumer dans la sphère publique
leur nationalité
anglaise, écossaise, galloise ou irlandaise. Anne de Bretagne,
que n'as-tu épousé le Prince de Galles au lieu de ces
maudits rois de France !
Polyculture et multilinguisme : Sans doute portons-nous
une vieille tradition de paysans et de marins. Mais au-delà des
vieux clichés
jaunis, nous avons une chance que n’ont pas les rejetons de la
vieille
république une et indivisible. Nous sommes divers et divisibles,
mais toujours
Bretons. Va comprendre,
Charles !
Qu’ils créent un ministère de
l’identité nationale !
Cela promet des tranches de rigolade mondiale, quand ledit
ministère rejettera
les vraies différences humaines dans la sphère
privée et peindra de la même
couleur les Bretons, les Antillais, les Juifs et tous les
immigrés. Bien sûr,
pour ne pas être complètement ridicule, on nous parlera
des
petites patries et de la grande
Patrie, des langues régionales et de la langue nationale, de
l’appartement Bretagne dans l’immeuble France. La France nous
donne le choix entre la négation et la dépendance.
L'identité française s'exprime par une carte que peuvent contrôler les policiers. Le Français est une
créature de papier. D’où son goût pour les diplômes et son aversion pour les sans-papiers.
Notre identité bretonne est un point de départ. Leur
identité française est un achèvement. C'est le mur
ultime de leur impasse.
JPLM

Mercuriale avril 2007