Guy Môquet (1924 - 1941)Icône de la Résistance française |
Guy Môquet est
né le 26 avril 1924. Son père, Prosper Môquet, député communiste de Paris est arrêté le 10 octobre 1939. Guy a donc 15 ans et demi. Il fait partie des Jeunesses Communistes. Il distribue des tracts, colle des papillons. Il est arrêté le 16 octobre 1940. Acquitté, il sera néanmoins transféré à Fresnes, à Clairvaux, puis au camp de Chateaubriant. Son arrestation ne correspond à aucun acte d'opposition au nazisme, ni même à aucune intention de s'y opposer. Les communistes n’en sont pas encore là. Le 24 octobre 1941, le lientenant-colonel Karl Hotz est assassiné à Nantes. Hitler demande en représailles l’exécution de 150 d’otages. Ceux-ci seront 48, mais on parlera des « 50 otages ». Guy Môquet en fait partie. Il écrira à ses proches une lettre d’adieu émouvante, mais sans aucune portée politique. Le 22 octobre 1941, Guy Môquet, évanoui, est traîné devant le peloton d’exécution. Il est fusillé en état d'inconscience, à 16 heures. Les lettres et documents des fusillés sont transmis à Jacques Duclos responsable du parti. Celui-ci les expédie à l'avocat communiste Joe Nordmann (ou à Aragon, selon les sources) avec cette mention « Fais de cela un monument ». Aragon rédige Les martyrs, publié en février 1942. Contre toute vérité historique, Maurice Thorez, chef du parti communiste à la Libération, transforme les communistes, avec pour avant-garde les fusillés de Chateaubriant, en précurseurs de la résistance au nazisme. En 1944, le général de Gaulle signe le décret qui fait de Guy Môquet un résistant à part entière. |
Ma petite maman
chérie, mon tout petit frère adoré, mon petit papa aimé, Je vais mourir ! Ce que je vous demande, toi, en particulier ma petite maman, c'est d'être courageuse. Je le suis et je veux l'être autant que ceux qui sont passés avant moi. Certes, j'aurais voulu vivre. Mais ce que je souhaite de tout mon cœur, c'est que ma mort serve à quelque chose. Je n'ai pas eu le temps d'embrasser Jean. J'ai embrassé mes deux frères Roger et Rino. Quant au véritable je ne peux le faire hélas ! J'espère que toutes mes affaires te seront renvoyées elles pourront servir à Serge, qui je l'escompte sera fier de les porter un jour. A toi petit papa, si je t'ai fait ainsi qu'à ma petite maman, bien des peines, je te salue une dernière fois. Sache que j'ai fait de mon mieux pour suivre la voie que tu m'as tracée. Un dernier adieu à tous mes amis, à mon frère que j'aime beaucoup. Qu'il étudie bien pour être plus tard un homme. 17 ans 1/2, ma vie a été courte, je n'ai aucun regret, si ce n'est de vous quitter tous. Je vais mourir avec Tintin, Michels. Maman, ce que je te demande, ce que je veux que tu me promettes, c'est d'être courageuse et de surmonter ta peine. Je ne peux en mettre davantage. Je vous quitte tous, toutes, toi maman, Serge, papa, en vous embrassant de tout mon cœur d'enfant. Courage ! Votre Guy qui vous aime Guy |
Août 39 : Les communistes veulent défendre la Pologne contre une agression hitlérienne. "C'est le sentiment unanime des Français dignes de ce nom". | ||
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L'Humanité :
"Il faut que la France soit, dans les meilleures conditions possibles,
à même de garder une attitude de fermeté et de
tenir ses engagements à l'égard de son alliée
polonaise menacée.
Celle-ci, qui fait front au danger sans faiblir, est en droit d'attendre que nous considérions toute visée contre elle comme un attentat contre tous les peuples libres, contre nous. C'est le sentiment unanime des Français dignes de ce nom. C'est le notre. L'heure est à l'union des Français. Si Hitler ose le geste qu'il médite, les communistes français, qui n'ont cessé de proclamer que la paix était indivisible et qui n'ont cessé de préconiser la fermeté contre toute agression fasciste, seront au premier rang des défenseurs de l'indépendance des peuples." Aragon :
"Il existe entre la France et la Pologne un traité d'assistance
mutuelle. C'est à dire que si la Pologne est victime d'une
agression, la France doit venir à son aide. Et tout bon
français qui ne veut pas voir se répéter la honte
de Munich, et l'abandon de nos alliés de Tchécoslovaquie,
souhaitera comme nous que la France tienne ses engagements
internationaux."
Le groupe parlementaire communiste :
"... mais si Hitler malgré tout, déclanche la guerre,
alors qu'il sache bien qu'il trouvera devant lui le peuple
français uni, les Communistes au premier rang, pour
défendre la sécurité du pays, la liberté et
l'indépendance des peuples.
C'est pourquoi notre Parti Communiste approuve les mesures qui ont été prises par le Gouvernement pour garantir nos frontières et apporter le cas échéant l'aide nécessaire à la Nation qui pourrait être agressée et à laquelle nous sommes liés par un traité d'alliance". |
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Le 1er septembre 1939, les troupes allemandes envahissent la Pologne. Le 17 septembre, les troupes soviétiques envahissent à leur tour la Pologne orientale, qu'ils annexeront à l'Union Soviétique et conserveront après la guerre. Le 28 septembre, Varsovie capitule devant l'armée allemande. Entre août et septembre 39, les communistes français changent de cap à 180° pour s'aligner sur les directives de Georges Dimitrov, chef du Komintern. Ils laissent tomber la Pologne, qu'ils qualifient de "fasciste". |
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"On ose cyniquement prétendre que la cause de la Pologne est la cause
de la liberté. C'est là un mensonge abominable. Ce qui est vrai, c'est
que le gouvernement polonais, qui s'effondra au bout de quinze jours de
guerre, après avoir multiplié les provocations destinées à empêcher la
formation d'un front de paix, était un gouvernement d'oppression et de
fascisme, qui prit de force Wilna à la Lithuanie et s'appropria des
territoires de la Tchécoslovaquie. (...) Pour ce qui est de la Pologne, on peut constater aussi que le mot d'ordre de reconstitution de l'Etat polonais recouvre des intérêts capitalistes." Cette argumentation est à mettre en parallèle avec celle qui justifiera l'invasion de la France quelques mois plus tard. Extrait d'un article du 16 mai 1940 de la Pravda, le grand journal russe porte-parole du régime : " On voit maintenant de quelle responsabilité se sont chargés les impérialistes d'Angleterre et de France, en rejetant les propositions de paix de l'Allemagne, en déchaînant une nouvelle guerre impérialiste en Europe". Les vaincus de 39-40, qu'ils soient polonais, Finlandais, Baltes ou Français ont toujours les mêmes torts : avoir rejeté les propositions de paix des agresseurs. |
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" Paix immédiate ! "
: Suite à l'invasion de la Pologne, la France et le Royaume-uni
ont déclaré la guerre à l'Allemagne
hitlérienne le 3 septembre 1939.
Le mot d'ordre Paix immédiate signifie, concrètement, qu'il faut demander un armistice à Hitler, et donc reconnaître l'invasion de la Pologne. Les communistes considèrent que la guerre est une guerre impérialiste, et non une guerre des démocraties contre le nazisme. L'ennemi principal est désormais l'impérialisme anglais. |
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"Nous
ne croyons plus aux mensonges officiels, aux bobards sur "la
défense de la liberté et de la civilisation". (...) La
vérité, c'est que la guerre actuelle est une guerre
impérialiste. Les financiers franco-anglais et les gros
industriels allemands se disputent la conquête des
matières premières et de nouveaux
débouchés. leur querelle n'est pas notre querelle.(...) Asservi économiquement, notre pays est transformé en "dominion" anglais. (...) Chacun des actes des ministres français est d'ailleurs dicté de Londres et l'on envisage même la création d'un pseudo parlement franco-britannique !!! (...) Un régime comparable à celui du régime hitlérien, et qui laisse loin derrière lui les plus sombres périodes du Second Empire, est maintenant installé chez nous." |
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"Demain,
si la France persiste à se laisser entraîner dans le
sillage anglais, les mêmes désastres, les périls,
les mêmes visions de mort envahiront l'Europe entière.
Cette guerre n'est pas la guerre du droit. C'est une guerre
impérialiste avec ses buts d'expansion comme en 1914-1918." "Hitler n'est pas seul responsable de la guerre. Les gouvernements réactionnaires de France et d'Angleterre l'ont préparée depuis toujours. (...) C'est un mensonge que la guerre actuelle est une guerre pour la liberté et pour sauvegarder l'indépendance des peuples. C'est une guerre entre capitalistes pour la domination du monde." |
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Jeunes travailleurs, ouvriers, paysans, la grande bourgeoisie et sa
presse asservie essaient de nous faire accepter leur guerre en
proclamant que c'est une guerre pour l'indépendance et la
liberté des peuples, pour la défense de la
démocratie, contre le fascisme ! (...) Non, mille fois non ! Cette guerre n'est pas la guerre de la liberté contre fascisme, mais la guerre des riches, la guerre des marchands de canon, la guerre impérialiste des 200 familles pour des buts de rapine (...) Non ! Il n'est pas vrai qu'Hitler et le fascisme hitlérien, bourreaux du peuple allemand, soient seuls responsables de la guerre. La bourgeoisie française et ses partis, y compris le Parti Socialiste, comme la bourgeoisie anglaise et les siens, en sont également responsables. Hitler a été leur homme ! C'est avec l'aide de la finance internationale qu'il a pris le pouvoir et c'est grace à la complicité, au soutien des cercles financiers de paris et de Londres et de leurs ministres qu'il s'y est maintenu." |
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L'ennemi est dans notre propre pays ! Ce troisième mot d'ordre, après celui de Paix immédiate et de Guerre impérialiste, détourne l'attention de ce qu'est véritablement le nazisme pour appeler à la guerre civile. |
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Guerre russo-finlandaise : Les troupes soviétiques envahissent la Finlande le 30 novembre 1939. L'hiver et la résistance acharnée des Finlandais bloque l'avancée de l'Armée Rouge. Venus pour "libérer" les Finlandais, les soviétiques obtiennent par le traité de Moscou (12 mars 1940) des cessions territoriales. Le "gouvernement de la République démocratique finlandaise" mis en place par les Soviétiques disparaît aussi brutalement qu'il était apparu. Les communistes français appellent au sabotage de l'effort de guerre français. |
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"La puissance de l'Armée rouge
et la ferme politique de Staline ont obligé les fascistes
finlandais à mettre les pouces. Les gardes blancs de Mannerheim
et de Tanner, agents du capitalisme mondial, ont dû traiter avec
le gouvernement des Soviets. C'est une grande victoire pour la cause
universelle des travailleurs (...)." "Daladier, Chamberlain, Mussolini, Franco et Pie XII soutiennent la clique des fascistes finlandais contre L'URSS; (...) Ouvriers, (...) par tous les moyens appropriés, en mettant en oeuvre vos ressources d'intelligence et toutes vos connaissances techniques, empêchez, retardez, rendez inutilisables les fabrications de guerre (...)" |
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Annexion de la Lithuanie par l'URSS : Profitant de l'attaque allemande à l'ouest, Staline attaque et annexe la Lithuanie. |
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En réparation des actes anti-soviétiques commis, le
gouvernement soviétique exigea le remplacement du ministre de
l'Intérieur et du chef de la police. Il demanda en outre, en
garantie contre la mauvaise volonté des cercles dirigeants
lithuaniens, le droit de libre passage pour l'Armée rouge et le
droit d'installer des garnisons sur tous les points du territoire. Ces conditions ont été acceptées le 15 juin à 19 heures. Elles ont eu immédiatement un commencement d'exécution. Un nouveau gouvernement a été formé. (...)" |
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Collaboration : Après l'attaque allemande du 10 mai 1940, l'effondrement français et l'armistice du 22 juin 1940, les communistes veulent trouver un modus vivendi avec les troupes d'occupation, dans la ligne du pacte germano-soviétique. |
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Pour remettre la France au travail. Les ouvriers ne demandent
qu'à travailler, ils attendent qu'on ouvre les usines, qu'on
leur donne de l'ouvrage. (...) Il n'est pas juste que la fuite de chefs
d'entreprise retombe sur les travailleurs, d'autant plus que les
patrons sont partis sans même payer leurs ouvriers. Le Général de Gaulle et autres agents de la finance anglaise voudraient faire battre les Français pour la City et ils s'efforcent d'entraîner les peuples coloniaux dans la guerre. Les Français répondent le mot de Cambronne à ces messieurs. " |
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Dès l'arrivée des troupes allemandes à Paris, les communistes leur demandent
l’autorisation de reparution de leur journal, l’Humanité. Mais les vainqueurs n’ont pas la même approche du pacte germano-soviétique. De plus, le gouvernement
de Vichy proteste auprès des autorités allemandes.
L’Humanité ne reparaîtra pas, malgré les efforts des émissaires du PCF, Denise Ginollin, Jeanne Schrodt et Maurice Tréand.
Question annexe : Où sont imprimés, à cette époque, les tracts et les brochures clandestines du PCF ? Une conversation a lieu le 10 mars 1940 à Rome entre Ribbentrop et Mussolini. Comme Mussolini s'étonne des journaux communistes qui continuent à être publiés en France malgré l'interdiction dont ils sont frappés, le ministre des Affaires Etrangères du Reich lui signale, en souriant, "que certains de ces journaux sont imprimés en Allemagne". (Europa verso la catastrofe, Milan 1948, p 526 écrit par le Comte Ciano, gendre de Mussolini. Cité par A Rossi, Deux ans d'alliance germano-soviétique, Ed Fayard, 1949, p 121) |
Conclusion : qu'est ce qu'un résistant ? Il est hors de notre compétence de décréter qui est résistant et qui ne l'est pas, comme il était hors de la compétence des roturiers de 1789 de décréter qui est noble et qui ne l'est pas. Guy Môquet a été décrété "résistant", il est un emblème de la Résistance. Il serait malséant et inutile de contester un titre qui n'appartient pas à notre époque. Comme les roturiers de 1789 ont donné à "noblesse" une définition correspondant aux réalités qu'ils connaissaient, nous donnerons à "Résistance" une définition correspondant aux réalités observées. En faisant une synthèse entre le gaullisme et la résistance communiste telle que les documents nous la présentent, nous pouvons avancer la définition suivante : Résistance (à la française) : Stratégie pour s'emparer du pouvoir politique de façon non conventionnelle, grâce à des alliances extérieures. |